Le Nouveau Testament dit souvent que le baptême a lieu « au nom de Jésus-Christ ». Mais à deux
reprises, Paul utilise une version abrégée de cette formule : « être baptisé en Christ »28. La préposition
« en » prend ici le même sens que dans l’expression : « être plongé en Christ ».
Etre plongé EN Christ
Ce n’est pas facile à comprendre. Paul explique
dans son épître aux Romains29, au chapitre 6,3-4
ce qu’il entend par là : « Ou bien ignorez-vous
que nous tous, baptisés en Jésus-Christ, c’est
en sa mort que nous avons été baptisés ? Par
le baptême, en sa mort, nous avons donc été
ensevelis avec lui, afin que, comme Christ est
ressuscité des morts par la gloire du Père, nous
menions nous aussi une vie nouvelle. » Etre
baptisé « en Christ », plongé « en Christ », c’est
être baptisé « en sa mort ». Non pas seulement
aimer le Christ très fort, ou penser à Lui sans
cesse, ou Lui confier sa journée, ou faire les
choses en son nom – comme si Jésus-Christ
était une sorte de référence extérieure pour nos
vies humaines. Etre plongé « en Christ », ce n’est
pas importer Jésus-Christ dans nos vies à nous,
mais entrer dans sa vie à lui, en participant à
sa mort et à sa résurrection. Paul utilise ici un
langage qu’il aime beaucoup, mais qui peut
paraître presque incompréhensible. Que veut-il
dire ?
L’événement central dont parle le Nouveau
Testament est la mort et la résurrection de
Jésus. Le Nouveau Testament ne se contente
pas de les raconter comme un fait divers dans
un journal, mais tâche de comprendre ce qu’ils
signifient « pour nous ». Il y a plusieurs manières
d’expliquer comment Pâques, le passage de
Jésus de la mort à la vie, affecte l’existence
de tous les hommes. Une des explications les
plus radicales se trouve chez Paul : si la mort
de Jésus devient ma mort, la vie de Jésus aussi
deviendra ma vie. Pour Paul, on ne peut pas
avoir la vie en Jésus-Christ sans avoir en même
temps sa mort.
Mourir avec Christ, vivre avec Christ
C’est le langage le plus intime, le plus radical
qui soit dans le Nouveau Testament. Et Paul
applique aussi ce langage au baptême. Il peut
le faire parce que le baptême évoque une mort,
un ensevelissement. Le mot « baptême » signifie
« plongée » : il fait penser à une entrée dans des
eaux profondes, qui peuvent nous ensevelir, où
l’on peut se noyer et mourir. Pour Paul, il ne s’agit
pas d’une mort physique, mais d’une mort « à »
quelque chose – d’une rupture définitive avec
tout ce qui pourrait séparer encore de Dieu.
La mort est la seule rupture sur laquelle on ne
peut revenir. C’est une bonne nouvelle, dit Paul :
les eaux du baptême peuvent recouvrir tout ce
que nous avons besoin de noyer, de laisser
mourir – ce que nous regrettons, ce que nous
aimerions dépasser, ce que nous voudrions
laisser derrière nous. Tout cela peut être noyé,
enseveli dans le baptême. Et tout comme
Jésus-Christ est revenu à la vie après avoir été
enseveli, de la même manière, nous sortirons
de cette noyade, lavés, allégés, émerveillés de
vivre encore malgré le danger.
Le baptisé meurt avec le Christ, il est « coenseveli
» avec le Christ et il « co-vivra » avec
le Christ. Ce n’est pas une image morbide,
mais une façon de souligner la radicale
nouveauté de vie du chrétien. Le baptisé entre
définitivement dans la vie de Jésus-Christ, pour
toujours. La mort est derrière lui.
C’est pourquoi le baptême contient aussi une
promesse pour les jours d’angoisse et de deuil,
de peur et de peine : même lorsque nous avons
l’impression de nous noyer, Jésus-Christ est
présent. Même lorsque l’eau nous recouvre, la
promesse de vie est là – à cause du parcours
de Jésus-Christ, parce que Jésus-Christ a été
plongé avant nous et a été relevé.
Voir aussi : Ephésiens 2,1-17 ; Colossiens 2,20 à 3,5.
28. Ga 3,27 ; Rm 6,3
29. Rm 6,3-4 mais on peut aller jusqu’à 14.