Qui suis-je pour être baptisé ?
Le baptême est donné à un être humain. C’est une évidence. Mais cela veut dire aussi qu’on ne peut pas parler du baptême « dans le vide » : si le baptême existe, c’est pour l’homme. Le baptême est fait pour l’homme, pour cette créature particulière qu’est l’homme. Mais alors, qu’est-ce que l’homme, pour qu’il ait besoin du baptême ? Qu’est-ce que l’homme avant le baptême ?
Dieu m’a créé à son image
Le Créateur est attaché à sa création. Il l’a créée comme quelque chose de « très bon » 1. Il ne crée pas le monde un beau jour pour ne plus s’en soucier ensuite : il y est resté attaché 2. Le Créateur aime sa création pour toujours 3.
Et il s’est attaché de manière particulièrement étroite à celle de ses créatures qu’on appelle « l’homme ». L’être de Dieu s’est lié à l’être de l’humain : Dieu a fait l’homme « à son image ». Dieu s’est fait particulièrement proche de l’homme 4.
Cela concerne l’humanité en général, mais aussi chaque individu, chaque personne particulière. Dieu n’a pas seulement créé la merveilleuse mécanique du corps et du cerveau humains : il m’a créé moi, il t’a créé toi, il nous a créés, en tant que personnes. Il façonne pour chacun un nom et une histoire 5. Il accompagne chacun de nos gestes et connaît chaque mouvement de notre coeur 6. Dieu s’est attaché à chaque être humain ; chacun est « aimé de Dieu »,
en tant que sa créature.
C’est cela, l’identité première de l’homme :
chaque personne est une créature aimée de son Créateur. Les autres identités, celles qui nous portent, celles qui nous pèsent,
celles qui nous ont été imposées ou celles que nous avons choisies, sont secondes par rapport à cette première identité. Dieu
aime l’homme – tout homme.
Mais suis-je vraiment le reflet de Dieu ?
Dieu aime l’homme, mais du point de vue
de l’homme, ce n’est pas si clair. Le récit de
la chute 7 montre comment l’homme a voulu
prendre son indépendance par rapport au
Créateur. Il a rejeté son état et son statut
de créature. Il n’a plus voulu du lien avec
Dieu ; il a voulu vivre, tout court, et non plus
« vivre devant Dieu ». Il s’est concentré sur
lui-même, au lieu d’être centré sur Dieu. Il
a voulu être le seul maître de sa propre vie,
« être dieu à la place de Dieu ». C’est cet
éloignement de Dieu, cette opposition à
Dieu qu’on appelle le « péché » 8. On peut
dire de l’homme qu’il est « aimé de Dieu » ;
mais il n’est pas « aimant Dieu ». Le Créateur
est attaché à sa créature « par nature »,
mais l’inverse n’est pas vrai.
Le lien avec Dieu est donc brisé. Et l’homme
ne peut rien y faire : il a quitté le domaine
de Dieu 9, il a tellement pris ses distances
avec Dieu qu’il en a oublié Dieu. Il est
devenu « sans Dieu » 10. Il a perdu le nom
qui le rattachait à Dieu. Il a refusé de vivre
l’histoire que Dieu lui proposait. C’est à
cet humain-là que Dieu va parler. Dieu ne
va pas laisser l’homme livré à lui-même.
Dieu va parler à l’homme sans Dieu. Et
c’est ici que le baptême a un rôle à jouer.
Le baptême est fait pour l’homme, pour
l’homme qui a voulu se débarrasser de
Dieu, pour l’homme « sans Dieu ». Il veut lui
redonner un nom nouveau.
1. Gn 1,1-25
2. Ps 33 ; 65 ; 104
3. Ps 136,1-9
4. Gn 1,26-30 ; 2,4-25 ; Ps 8
5. Gn 17 ; 35,1-15 ; Es 43,1-7
6. Ps 139
7. Gn 3,1-24
8 . Gn 4,1-16
9. Gn 3,23-24
10. Ep 2,12